Nouvelle collaboration: enseigner l’histoire autrement en 1ère et 2e secondaire

Après plusieurs mois à garder le secret, je peux enfin en parler: je travaille en ce moment à la création de nouveaux cahiers d’histoire destinés aux élèves de 1ère et 2e secondaire! Les éditions Pearson ERPI m’ont en effet demandé d’écrire plusieurs chapitres d’une collection inédite et éclatée, ARCHIVES, qui sera disponible dès la rentrée 2019.

Le matériel pédagogique actuel est très bien fait. Ceux et celles qui disent le contraire n’ont possiblement pas ouvert un cahier d’histoire depuis leur propre passage au secondaire! Or, toutes les maisons d’édition scolaire québécoises doivent respecter le même programme et la même Progression des apprentissages, tels que définis par le ministère de l’Éducation (si vous le permettez, on n’entrera pas dans le débat du «politiquement correct»: ce n’est pas le propos ici). Les maisons d’édition scolaire ont aussi l’habitude de travailler avec des rédacteurs pédagogiques spécialisés, selon des gabarits graphiques assez classiques. Cela fait en sorte que les cahiers d’activités finissent par tous se ressembler un peu. Beaucoup, même. Bref, de la qualité, mais peu de diversité.

Quand j’aurai les premières maquettes, je promets de revenir mettre des images. En attendant, on se contentera de ceci. 🙂

 

Réinventer la roue? Pourquoi ne pas essayer?

Sans pour autant retirer du marché sa collection Espace Temps Histoire, Pearson ERPI a décidé d’en créer une autre en parallèle. Pour cette nouvelle collection, ARCHIVES, on a recruté des auteurs historiens qui ne sont pas des rédacteurs pédagogiques. Il y a une autre «personnalité connue» qui participe au projet, mais je ne veux pas révéler son identité sans avoir obtenu son autorisation, alors je me tais pour l’instant. Le graphisme a été créé par des illustrateurs qui ne travaillent pas habituellement en édition scolaire. Bref, je participe à une équipe où il y a plusieurs regards neufs.

En tant qu’historienne, c’est un grand bonheur et un privilège de collaborer à cette nouvelle collection. Chacun de «mes» chapitres sera signé. J’y aurai même des encadrés spéciaux où je m’adresserai directement aux élèves pour leur raconter une anecdote ou un fait insolite.

Je suis vraiment ravie! Raconter l’histoire autrement, piquer la curiosité de nos ados et, je l’espère, semer en eux les graines d’une future passion pour l’histoire: voilà un superbe mandat qui me donne l’occasion d’accomplir tout cela.

*

À présent, parents et surtout amis du milieu de l’enseignement au secondaire, la balle est dans votre camp. Démontrez votre intérêt pour cette nouvelle collection ARCHIVES qui, je le disais plus haut, sera disponible à temps pour la rentrée scolaire 2019. Envoyez la nouvelle à vos collègues. Et restez à l’affût: ce sera bientôt en ligne sur le site web de Pearson ERPI.

Qui sait, après les cahiers pour la 1ère et la 2 secondaire, l’éditeur décidera peut-être de faire la même chose pour les 3e et 4e secondaire, qui mettent l’accent sur l’histoire québécoise! J’en serais fort heureuse, je vous assure 🙂 D’ici là, je retourne à mon chapitre sur la Renaissance!

Bises.

– Catherine

Historienne, auteure et conférencière, Catherine Ferland est spécialiste d’histoire culturelle du Québec, plus précisément d’histoire de l’alimentation, de l’alcool et de la gastronomie. Elle a écrit ou coécrit une quarantaine d’ouvrages et articles, dont Bacchus en Canada. Boissons, buveurs et ivresses en Nouvelle-France et La Corriveau, de l’histoire à la légende.  Elle signe des articles dans près d’une dizaine de journaux et revues, dont Le Devoir et donne régulièrement des conférences au Québec et en France. Elle est aussi la fondatrice et présidente des Rendez-vous d’histoire de Québec. Catherine vit à Québec avec son amoureux, ses trois ados… et ses deux pinschers nains!

 

Qu’est-ce que tu «voeux» pour l’an neuf?

Bon sang. Force est de constater que j’ai été moins assidue que jamais sur mon blogue cette année. Si on ne fiait que sur ce paramètre, on pourrait bien croire que j’ai passé ces longs mois à flâner nonchalamment, en quasi retraite… mais si vous me suivez sur les réseaux sociaux, vous savez qu’il n’en est rien. Au contraire.

Permettez-moi de me livrer à un petit exercice tenant à la fois de la récapitulation et de la gratitude, de l’espoir et des résolutions. C’est pour moi l’occasion de remercier plein de monde. Je me concentrerai ici sur la sphère professionnelle, même si mes pensées premières vont à mes enfants, à mon chum, à mes amis… et à mes comparses de karaté! 🙂

Trois choses qui m’ont rendue heureuse en 2017

  • La poursuite de mandats entrepris dans les dernières années. MERCI notamment au journal Le Devoir, pour lequel j’écris depuis 2012, ainsi qu’à Cathy Chenard et à l’équipe de La Voie agricole, qui m’ont fait confiance pour une 4e saison consécutive: attendez de voir les belles capsules d’histoire, de terroir et de patrimoine qu’on vous a préparé!
  • La participation, comme chroniqueuse en histoire, à de nombreuses émissions de radio. J’ai particulièrement apprécié le privilège d’être «l’historienne en résidence» à Radio-Canada cet après-midi pendant une grande partie de l’année, ainsi que mes passages à Aujourd’hui l’histoire. MERCI aux auditeurs qui téléphonent ou écrivent pour dire qu’ils aiment mes capsules d’histoire!
  • La diversité des mandats d’articles en histoire… pour des revues qui ne sont pas du tout spécialisées en ce domaine! (L’histoire, c’est comme le sel : ça rehausse la saveur de pas mal de choses.) MERCI à Maison 1608 de me faire confiance pour plusieurs de ses revues (Magazine Y, Classe Affaires, 1608 et Vie de Château) ainsi qu’à Quatre-Temps et à Reflets.

Trois choses qui m’ont déconcertée et (agréablement) surprise en 2107

  • La participation à plusieurs activités inattendues, par exemple des tournages pour la Fabrique culturelle et pour le Musée de la civilisation à Québec, et surtout la superbe mission de conférences en Bourgogne avec la Commission franco-québécoise sur les lieux de mémoire communs. De beaux cadeaux dans mon année: MERCI!!!
  • La quantité et la qualité des invitations de presse, notamment au Bora Parc, à la Champagnerie, au Petit Manoir du Casino, au Côtes à Côtes resto grill, au Château Frontenac, au Cirque équestre Ekasringa, etc. MERCI à ces partenaires ainsi qu’aux chouettes équipes de Brouillard et de Tac Tic Marketing.
  • J’ai aussi obtenu de nouveaux mandats pour lesquels je dois demeurer discrète, confidentialité des clients oblige. Dans le jargon, on appelle la chose du ghostwriting, c’est-à-dire que, comme à Pierrot, je prête ma plume pour écrire des mots… sans que mon nom apparaisse. Mais puisque ces mandats touchent de très près mes valeurs et mes intérêts, c’est hyper agréable. MERCI à ces clients de m’avoir choisie comme trouvère pour faire chanter des mots sur des thèmes raffinés et gourmands.

La chose dont j’ai été la plus FIÈRE en 2017

  • L’organisation des premiers Rendez-vous d’histoire de la Nouvelle-France. Encore MERCI au Septentrion pour l’appui et au Griendel pour l’accueil, et merci surtout à toutes celles et tous ceux qui m’ont suivie dans cette aventure, prêtant leur savoir et leur être à la communication de l’histoire! Vous avez été fantastiques!

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Maintenant, trêve de récapitulation : cap sur l’avenir!

Cinq choses que je «voeux» et espère pour 2018

  • Entreprendre de nouveaux mandats de rédaction, de biographies et d’édition.
  • Atteindre le cap des 40 conférences dans l’année. (J’en ai donné 34 en 2017.) Pour le moment, il y en a déjà 11 de planifiées, alors ça augure bien. Celles avec formule dégustation «pognent» particulièrement beaucoup! Hi hi hi!
  • Trouver encore de nouvelles manières de communiquer l’histoire avec passion, à toutes sortes de publics. J’aimerais accroître les collaborations avec les musées. Et bien sûr, je compte revenir à la charge avec une seconde édition des Rendez-vous d’histoire
  • Me faire confier d’autres missions de conférences en France. Je l’admets volontiers, j’ai eu la piqûre. Et tant pis pour le décalage horaire, hein.
  • Finir et publier mon nouveau livre

Pour arriver à faire tout ça, je devrai bien sûr renoncer à «être à jour» en matière de sorties de films au cinéma, ma pile de livres à lire continuera de s’accroître, je consacrerai de nombreuses soirées et fins de semaine à travailler, mais le jeu en vaut la chandelle. Parce que j’y crois et que j’adore ça. Mon indice de bonheur n’a jamais été aussi élevé.

*

Et vous, qu’est-ce qui vous a fait vibrer en 2017 et, surtout, qu’espérez-vous de l’année qui vient? La vie est trop courte pour se contenter de laisser s’écouler des jours fades : osez rêver, osez voir grand, osez vous lancer! On ne sera jamais trop de gens passionnés et heureux.

Mes meilleurs vœux pour 2018, chers vous-z-autres!  😀

Bises.

Catherine

Historienne, auteure et conférencière, Catherine Ferland est spécialiste d’histoire de l’alcool et de la gastronomie et, plus largement, d’histoire culturelle du Québec. Elle participe régulièrement à des émissions de radio et de télé, en plus de faire des conférences aux quatre coins du Québec. Elle a écrit ou coécrit une trentaine d’ouvrages et articles, dont Bacchus en Canada. Boissons, buveurs et ivresses en Nouvelle-France et La Corriveau, de l’histoire à la légende.  Elle signe des critiques culinaires au journal Le Devoir et fait régulièrement des chroniques d’histoire à Radio-Canada. Elle vit à Québec avec sa famille.

 

Bilan de 25 mois d’entrepreneuriat et de passion

Ce que j’ai appris, espéré, réfléchi, accompli

Il y a maintenant un peu plus de deux ans que j’ai osé me lancer en affaires. N’ayant presque jamais côtoyé d’entrepreneurs (les membres de ma famille et mes amis étant, pour la plupart, employés de l’État ou d’entreprises privées), j’ai dû me former et puiser l’inspiration ailleurs. Je vous présente ici, bien humblement, quelques réflexions sur mon parcours entrepreneurial encore tout jeune, tant sur les facteurs de réussite que sur les éléments n’ayant pas abouti.

N’hésitez pas à me livrer vos réactions à la fin de cet article! 🙂

Photo: Crawford Iffland/Unsplash

Photo: Crawford Iffland/Unsplash

1. L’organisation est la clé de tout. Sans structure, même les meilleures idées ou les projets les plus prometteurs n’ont aucune chance d’aboutir. Il est essentiel de planifier les étapes et le temps nécessaire pour les mener à bien. Dans ma première année en affaires, j’ai «échappé» un mandat important parce que ma gestion de projet laissait à désirer et que j’avais mal évalué le temps, les délais, les éléments relevant des collaborateurs… De manière générale, je ne me préparais pas assez, étant dispersée dans autre chose. Je manquais d’expérience et d’outils. Pour y remédier, j’ai lu sur le sujet et je me suis trouvé (en les adaptant) des modèles de gestion de projets. Je vous assure que j’ai mené mes mandats suivants de façon beaucoup plus serrée!

2. L’audace est payante à court, moyen et long terme. Ça semble une évidence, mais ce n’est pas toujours facile d’oser et de s’afficher avec enthousiasme et confiance en soi. Est-ce notre fameux «héritage judéo-chrétien» qui sabote parfois la volonté de réussir en nous soufflant à l’oreille «Ben voyons, pour qui te prends-tu?» Mais c’est important de s’affranchir de la peur d’avoir l’air vaniteux, car après tout, lorsqu’on parle de son travail ou de son produit avec passion, on a tout simplement l’air… passionné! Personnellement, j’ai dû travailler beaucoup sur ma timidité naturelle, qui freinait le réseautage. Le fait de m’appuyer sur ma passion pour proposer mes services m’a aidée à surmonter mon sentiment d’imposteur et, surtout, m’a permis de décrocher de très intéressants contrats.

3. Exprimer un souhait publiquement contribue à sa réalisation. Une bonne idée, l’envie d’entreprendre un projet, le désir d’explorer une avenue n’auront aucun retentissement concret si vous gardez cela pour vous! Mais quand on en parle autour de soi, cela produit deux effets. D’abord, on engage sa parole, d’une certaine façon, puisque notre entourage nous en parlera: «Puis, ton livre, ça avance?» Si vous saviez le nombre de trucs (mandats professionnels ou projets personnels) que j’ai complétés par orgueil! 😉 Ensuite, j’ai remarqué que le fait d’en parler «attire» bien souvent les bonnes personnes pour en permettre la réalisation. Si on est informé de votre intérêt, l’information circule et il y a bien plus de chances qu’on vous propose quelque chose en ce sens. Bah, cela fait quelque fois que j’exprime mon désir de trouver un mécène pour m’envoyer en Europe… qui sait? Hi hi!

4. La chance est un élément non négligeable dans la réussite entrepreneuriale. Eh oui, rien ne sert d’être hypocrite, il est vrai que le facteur chance intervient souvent en affaires. Être au bon endroit au bon moment, rencontrer «par hasard» la personne qu’il faut, voir ou entendre quelque chose qui nous permet de débloquer une situation sur laquelle on butait depuis quelques temps… Mais en même temps, s’agit-il vraiment de chance ou bien d’une sorte de synchronicité qui s’installe et «fait arriver les choses», quand on est connecté à sa passion et aux humains qui nous entourent? Je n’ai pas la réponse à cette question. Je continue à m’interroger…

5. Rigueur et persévérance sont garantes de succès. Ces jours-ci, j’ai le grand bonheur de collaborer à nouveau avec un homme pour lequel j’ai beaucoup d’estime, Jean-Robert Leclerc, ancien président des Biscuits Leclerc. J’apprends beaucoup en côtoyant monsieur Leclerc, notamment au chapitre de la rigueur: l’entreprise qu’il a dirigée existe depuis 111 ans, de père en fils, et ce n’est pas par hasard! Être exigeant envers soi-même, se perfectionner, mettre du temps et de la constance dans les efforts, voilà qui mène à la réussite, bien plus que des attitudes défaitistes. Mais attention, il ne faut pas confondre persévérance et entêtement. Ce qui m’amène au point suivant.

6. Oser écouter son instinct. Ah! l’instinct. Dans les sphères intellectuelles, c’est un élément qu’on a tendance à mettre de côté au profit d’arguments rationnels. Pourtant, être à l’écoute de ses sensations, de son feeling par rapport à un projet, à une personne, à un client, c’est indispensable. Dans les dernières années, il m’est arrivé à trois reprises de faire fi de cette petite voix (qui me prévenait que quelque chose ne marchait pas) et de m’entêter en me «raisonnant»: que pensez-vous qu’il s’est produit? Ces trois expériences ont été insatisfaisantes, voire éprouvantes. Je m’en suis sortie, j’ai appris, certes… mais à quel prix! Bref, le jugement combiné à l’instinct, c’est gagnant. Et dorénavant, quand je ne «sens» pas quelque chose, je rectifie le tir.

7. L’innovation et le développement aident à se renouveler. J’en avais parlé un peu dans mes billets sur le métier d’historien (voir partie 1 et partie 2), mais l’ouverture à la nouveauté est comme un vent frais qui vient aérer une pièce et l’empêcher d’accumuler trop de poussière. Je n’ai jamais compris que certaines personnes fassent la même conférence depuis 20 ans, écrivent des articles qui parlent toujours de la même chose, ou exercent leur profession de manière identique à ce qu’ils ont toujours fait. Le monde change, nous devons changer aussi, au risque de s’encroûter. Par exemple, mes trucs sur l’histoire des boissons sont bien sûr mon «fond de commerce» depuis mon doctorat, mais j’ai peaufiné ma manière d’en parler (avec dégustation: une formule qui plaît beaucoup!) et, surtout, exploré plein d’autres champs. Et je continue de le faire. J’aime me lancer des défis.

8. Être proactif: démarrer des projets et proposer des collaborations. Ce constat ne s’applique peut-être pas à tous les domaines, mais dans celui où j’exerce, c’est une attitude qui m’a bien servie jusqu’à présent. Communiquer avec des réalisateurs pour proposer des chroniques d’histoire, avec des rédacteurs pour offrir des articles sur des sujets précis, avec des responsables de sociétés d’histoire pour indiquer mon intérêt à faire des conférences… Si j’étais restée «sagement» dans mon bureau à attendre les mandats, je pense que bien des choses se seraient passées autrement! Et j’admets que c’est très satisfaisant, d’un point de vue personnel, lorsqu’une démarche porte fruit!

Photo: Kendall Lane/Unsplash

Photo: Kendall Lane/Unsplash

9. Garder le focus, toujours. C’est si facile de se laisser submerger par les courriels, les réseaux sociaux, les médias électroniques, les vidéos d’enfants cutes ou d’animaux, les «p’tits jeux niaiseux», les pétitions, les trop nombreux abonnements à des sites, listes d’envois ou pages qui nous inondent de trucs… Certaines journées, j’avoue être plus dissipée et me laisser engluer par tout cela. Mais après 25 mois en affaires, je suis devenue plus efficace dans ma «gestion de l’essentiel» et j’en suis très fière! Je me fixe des objectifs hebdomadaires et, au jour le jour, des objectifs plus immédiats, ce qui m’aide à garder la concentration. Donnons la priorité aux priorités, comme disait l’autre.

10. En cas d’erreur, faire amende honorable et en tirer une leçon. Il m’est arrivé, comme à tout le monde, de commettre des erreurs. C’est humain, de se tromper! Au lieu d’en faire tout un plat et se terrer dans son lit pendant 6 mois, il me semble nettement préférable de présenter des excuses et de déterminer la marche à suivre pour éviter de refaire la même gaffe. Par exemple, une fois, je venais de finir de préparer un chouette article pour une revue et, tout heureuse de l’avoir terminé et envoyé, j’ai publié une mention à cet effet sur Facebook… oubliant l’embargo qui avait été demandé pour garder secrète la thématique du numéro. Je ferai sans doute encore bien des gaffes, mais certainement plus celle-là!

*

Voilà, il y aurait sans doute bien d’autre chose à dire, mais j’avais envie de témoigner ici, dans ce petit bilan, des éléments qui me semblent les plus significatifs. Si vous avez envie de réagir, que vous soyez entrepreneurs ou non, je vous y encourage!

Catherine

Historienne, auteure et conférencière, Catherine Ferland est spécialiste d’histoire de l’alcool et de la gastronomie et, plus largement, d’histoire culturelle du Québec. Elle participe régulièrement à des émissions de radio et de télé, en plus de faire des conférences aux quatre coins du Québec. Elle blogue au catherineferlandhistorienne.com et signe des collaborations gourmandes dans Le Devoir depuis 2012.

Splendeurs et misères du PhD

La fois où j’ai eu envie d’en finir… avec l’érudisme

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Catherine Ferland à TEDxQuébec, décembre 2015. Photo: Daniel Lévesque Photographe

Faire un doctorat n’est pas une sinécure. C’est un processus qui relève à la fois de l’idéalisme, de l’entêtement et d’une certaine dose de folie. Que de sacrifices pour ajouter les petites lettres «PhD» après son nom! J’ai survécu à cette aventure et je m’évertue à présent à aider les nouvelles victimes de cette «terrible» affection… et tout particulièrement leur entourage.

C’était le propos de l’une de mes plus récentes excentricités: la conférence «De l’érudition à la passion: vaincre le PhD» que j’ai eu le plaisir de présenter à l’occasion de l’événement TEDxQuébec le 1er décembre 2015 au Théâtre Périscope. 🙂

Une hausse des cas de PhD

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Données: OCDE Infographie: Catherine Ferland

Il faut dire que le nombre de personnes atteintes de PhD [i.e. qui ont obtenu le titre de Philosophiae Doctor après avoir complété un doctorat] est en croissance. Depuis 10 ans, une hausse de 56%, soit 250 000 nouveaux cas par année, a été enregistrée dans les pays de l’OCDE. On estime même que 1,6% de la population des pays dits «développés» serait atteinte de PhD.

Ça fait du monde, ça…

Employant une forme humoristique, j’ai voulu décrire ce qu’est vraiment le PhD. J’ai d’abord présenté les modes de propagation de cette étrange condition. N’étant pas une tare génétique, le PhD se contracte par contact direct avec d’autres personnes affectées, le plus souvent dans ce foyer de propagation très risqué qu’est le campus universitaire. Le signe avant-coureur à surveiller est la maîtrise: connaître un épisode de M.A. ou de M.Sc. rend le sujet beaucoup plus à risque de développer le PhD. Et qui sont les plus dangereux agents de contamination? Les professeurs! 🙂 (Sans rancune, chers amis de Sherbrooke, de l’UQAR, de l’U. Laval, de l’UQTR et d’ailleurs!)

Dans mon intervention, j’ai ensuite tâché de décrire quelques-uns des symptômes les plus pénibles associés au PhD.

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Image du fond: Tiphaine Rivière

Le premier symptôme, la recherchose, apparaît dès les premières phases de l’affection. La recherchose pousse le sujet à accumuler une somme invraisemblable de connaissances et de savoirs sur des choses jugées parfaitement inutiles à la vie quotidienne.

Mal soignée, la recherchose entraîne assez vite l’apparition du second symptôme: la méthodologite.

La méthodologite consiste à la compulsion d’analyser, classer et catégoriser les informations accumulées au moyen de méthodes extrêmement ésotériques. La conception du monde se déforme, ce qui enferme progressivement le sujet dans une sorte d’état permanent de stupeur et de déconnexion avec le réel.

cferland-phd-zombieMais encore là, il est possible de s’en sortir: lorsque le PhD est pris à temps et soigné adéquatement, une rémission presque complète est possible. C’est d’ailleurs ce qui arrive à environ 60% à 70% des cas. Les autres 30% à 40% restants, par contre, s’exposent au pire…

Car si le PhD continue sa progression, un troisième symptôme, le plus grave, apparaît: l’érudisme.

Ah! l’ÉRUDISME. Il entraîne une importante enflure verbale (tant à l’oral qu’à l’écrit) accompagnée d’épisodes aigus où le sujet, à l’instar des gens atteins du syndrome de Gilles-de-la-Tourette, va se mettre à proférer des gros mots… Lesquels? Pour en savoir plus, vous devrez visionner ce qui suit!

Pas facile pour une relation (familiale, amicale ou amoureuse) de survivre à autant de violence verbale! C’est la raison pour laquelle j’ai choisi de finir en évoquant les différents moyens pour «soulager» le PhD et son entourage. Outre la zoothérapie, l’élément-clé est tout simplement… l’AMOUR.

Parce que je suis persuadée que derrière chaque PhD qui s’est épanoui, il y a (ou il y a eu) au moins une personne qui l’a pris dans ses bras et qui lui a dit : «C’est important, ce que tu fais. Je crois en toi. Et je t’aime.» En mon nom personnel et au nom de tous les PhD, je veux remercier ces personnes d’être là (ou d’avoir été là) au bon moment. C’est grâce à vous que nous pouvons nous reconnecter avec le monde réel et avec ce qui compte vraiment.

*

9782021125948Lien vers toutes les conférences TEDxQuébec.

Lien vers toutes les conférences TEDx (independantly organized TED event).

Lien vers toutes les chaînes TED.

Pour finir, lien vers le livre de Tiphaine Rivière, Carnets de thèse (Seuil, 2015): l’auteure m’a aimablement autorisée à utiliser ses images pour illustrer mes propos! Un livre plein d’humour et qui, bien qu’il décrive une situation parisienne, fera sourire les étudiants de cycles supérieurs de partout dans le monde!

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Ceux qui suivent mon activité professionnelle auront remarqué à quel point je navigue dans des eaux toujours différentes, tout particulièrement depuis la dernière année. C’est vrai que les derniers mois ont très intenses pour moi. Je vous avoue une chose: plus que jamais, je ressens une sorte d’urgence de faire des trucs fous, ce qu’on appelle communément «sortir de sa zone de confort». Je veux profiter de ce que la vie peut offrir d’expérience trépidantes. Certains pratiquent des sports extrêmes ; moi, j’ai choisi de mener une vie extrême!

Cap sur 2016, à présent! Je souhaite à chacun une année épanouissante et pleine d’amour!

Bises.

Catherine

Historienne, auteure et conférencière, Catherine Ferland est spécialiste d’histoire de l’alcool et de la gastronomie et, plus largement, d’histoire culturelle du Québec. Elle participe régulièrement à des émissions de radio et de télé, en plus de faire des conférences aux quatre coins du Québec. Parmi ses ouvrages, mentionnons Bacchus en Canada. Boissons, buveurs et ivresses en Nouvelle-France (Septentrion, 2010) et La Corriveau, de l’histoire à la légende (Septentrion, 2014), gagnant du Prix littéraire du Salon du livre du Saguenay–Lac-Saint-Jean 2015 et finaliste aux Prix littéraires du gouverneur général 2014 ainsi qu’au Prix Jean-Éthier-Blais 2015.  Elle blogue au catherineferlandhistorienne.com et signe des critiques culinaires au journal Le Devoir depuis 2012.

Devenir historien en 7 étapes (suite et fin)

Ou comment tirer son épingle du jeu dans un contexte chaotique

Dans la première partie de ce billet – qui a d’ailleurs suscité beaucoup de réactions et de commentaires, un grand merci! – je vous révélais mes trois premiers «commandements» de l’historien. Voici le reste de ma réflexion avec les quatre suivants. Je vous avise cependant que j’y vais «un peu raide» à certains moments, parce que c’est mon blogue et qu’il s’agit d’une tribune où j’estime pouvoir vous livrer le fond de ma pensée. Cela n’engage évidemment que moi. Voilà, vous êtes prévenus… Vous êtes prêts? Allons-y. 

4) De stratégie tu useras résolument pour faire ta place

Attaché à suivre les traces du passé, le nez dans ses archives, l’historien n’est PEUT-ÊTRE pas la «bibitte» la plus stratégique de l’univers. Eh oui. Ce n’est pourtant pas l’intelligence ou l’esprit critique qui lui fait défaut, bien au contraire… mais la formation en sciences historiques ne développe pas spécifiquement la «combattivité» indispensable pour s’imposer sur le marché du travail. Tandis que l’étudiant en droit, en sciences ou en marketing a souvent un plan de carrière, avec des stages et des emplois d’été dans son milieu, l’étudiant en histoire a un parcours beaucoup plus… hem… aléatoire.

La bonne nouvelle, c’est qu’il est possible devenir un meilleur stratège. D’apprendre à «fourrer son nez» aux bons endroits pour rencontrer les bonnes personnes (revoir le «commandement» #2), trouver des mandats et décrocher des contrats. Et je vous rassure: être stratégique n’enlève rien à la «noblesse» de notre profession. Il s’agit ici de ne pas attendre passivement et, surtout, d’éviter de manquer de belles opportunités. Alors prenez le temps de vous projeter dans le futur. Où vous voyez-vous dans 6 mois? Dans 3 ans? Dans 9 ans? Quelles seraient les étapes pour y parvenir, en tenant compte de vos connaissances actuelles? Qui pourrait vous aider à atteindre vos objectifs?

cferland-3-cartesJe ne saurais trop vous recommander de vous faire faire des cartes d’affaires et d’en avoir toujours quelques-unes sur vous. Cela projette une image professionnelle et évite de devoir griffonner vos coordonnées sur un bout de papier! Si vous êtes actif dans plus d’un créneau, vous pouvez même avoir des cartes différentes pour refléter vos expertises. Par exemple, désireuse de bien distinguer mes secteurs d’activité, j’ai des cartes d’affaires à titre d’historienne gourmande, de biographe et de coach en communication… ce qui me permet de remettre ce qui convient à mes clients potentiels.

Mais attention: si on ne fait pas sa place en longeant les murs, ce n’est pas non plus en «tassant» les autres que vous laisserez la meilleure impression. C’est vrai en toutes circonstances, remarquez bien. Être stratège, c’est aussi comprendre qu’il est dans l’intérêt général de s’allier plutôt que de s’affronter. N’hésitez pas à recommander vos amis, à leur faire suivre des offres pertinentes. Soyez un joueur d’équipe: notre belle discipline ne s’en portera que mieux!

5) De travailler gratuitement tu refuseras absolument

Bon, il est temps de se dire «les vraies affaires». Un historien est (souhaitons-le) passionné par son travail, mais cette passion ne signifie pas pour autant qu’il travaillera gratuitement. Comptez-vous sur la «passion» de votre comptable pour qu’il fasse votre rapport d’impôts sans se faire payer? Sur la «passion» de votre plombier pour réparer votre évier sans facturer ses honoraires? Ou sur la «passion» de votre dentiste pour repartir de son cabinet sans sortir votre carte de crédit? Certaines personnes semblent pourtant croire que les historiens, eux, peuvent et doivent accepter de travailler pour rien! C’est connu, l’histoire rend scandaleusement riche! 😉

Il y a lieu de définir ce que j’entends par «gratuité». Gratuit, c’est sans cachet ou rémunération, mais aussi sans attrait professionnel ou personnel. Rien pantoute. Si j’estime qu’une activité réalisée bénévolement m’apporte quand même quelque chose (au plan de la reconnaissance, de la renommée, de la philanthropie, etc.), bref que j’y trouve mon compte, il se peut que je décide d’accepter. Et s’il y a une compensation raisonnable, la prise en charge de mes frais de déplacement, de repas ou d’hébergement, bref que je sens que mon interlocuteur fait des efforts sincères pour bénéficier de mes services, ça pèsera aussi dans la balance. Mais en bout de ligne, c’est ma décision et je l’assumerai.

Oui, c’est VOTRE décision: ne laissez personne vous imposer sa vision à coups de «Ça va te faire de l’expérience». Surtout si vous en êtes à une étape de votre carrière où vous avez déjà l’expérience voulue pour gagner votre vie! Usez de  jugement.

Sans compter un effet pernicieux: si vous acceptez trop souvent de travailler en-deçà de votre valeur, les gens finiront par penser que vous valez effectivement moins. Vous connaissez sans doute la propension des gens à accorder plus de respect et de considération à ce qui coûte plus cher… Eh bien c’est la même chose lorsqu’on est historien autonome. Il faut doser, c’est tout.

Laissez-moi vous raconter une petite anecdote. Il y a quelques mois, «on» m’a proposé de faire une conférence historique d’une heure dans le cadre d’un événement. «On» me demandait d’y prendre part à titre gracieux, expliquant que l’organisme était sans but lucratif (ce que je peux comprendre) mais en ajoutant – et c’est ce qui m’a piquée au vif – que l’on comptait «sur la passion pour l’histoire qui anime nos conférenciers» pour accepter de… faire plusieurs heures d’auto et aller carrément travailler à mes propres frais! J’ÉTAIS SUPER FRUE car, comme je lui ai répondu aussitôt, «cet argument est inacceptable et irrespectueux envers les historiens puisqu’il dévalue la nature, le sérieux et l’ampleur de notre travail.» Cibole!!! Si vous souhaitez lire l’histoire complète avec ses détails plus «crunchy», c’est ici.

6) Un meilleur communicateur tu t’efforceras de devenir

cferland-presentation-vintageLa communication, aujourd’hui, c’est le nerf de la guerre. Même pour quelqu’un qui préfère la compagnie des livres et des archives, la prise de parole en public (ou dans l’espace public, numérique compris) est INÉVITABLE. Pour se démarquer en histoire, savoir s’exprimer clairement et avec passion est une aptitude extrêmement précieuse. Là, vous avez envie de me dire «Ouais, c’est facile à dire, ça, Catherine: tu as ça dans le sang!» Eh bien, apprenez ici mon terrible secret: je suis foncièrement introvertie, solitaire et même plutôt timide. C’est un aspect sur lequel j’ai beaucoup, beaucoup travaillé depuis toute ma vie 15 ans. Jeune, j’étais terrorisée par les exposés oraux. Si vous m’aviez entendue lors de mes premières conférences ou lors de mes premiers passages à la radio… ouf!

J’ai lu d’innombrables ouvrages sur la communication pour mieux comprendre les dimensions théoriques. Réflexe d’historienne! Puis, il a bien fallu me «mouiller» : j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai fait des communications dans des colloques, des conférences publiques, des interventions sur diverses tribunes. Parfois, on venait me chercher, alors qu’à d’autres moments, c’est moi qui ai pris l’initiative de me présenter afin d’acquérir de l’expérience. Je puis maintenant dire que je suis parfaitement à l’aise lorsque je prends la parole en public, aussi bien face à un micro de radio qu’en mini-colloque avec 12 personnes ou devant une salle de 200 personnes.

Pendant que j’ai votre attention, j’en profite vous informer qu’avec mon amie – et ancienne étudiante! – Marie-Hélène Janvier, j’ai fondé une compagnie, Académie Odyssée, afin d’offrir de la formation en communication aux étudiants et jeunes chercheurs en sciences humaines. Je veux enseigner mes meilleurs trucs, durement acquis au fil de mon expérience personnelle, pour permettre à d’autres de développer leur potentiel oratoire. Fin de l’infopub! 😉

Malgré tout le chemin parcouru, je dois encore travailler ce que j’appelle mes micro-interactions: vous savez, quand on arrive dans une salle où l’on ne connaît personne et qu’il faut aller se présenter. Il m’arrive encore souvent de «figer» ou d’éprouver une grande timidité, une sorte de syndrome de l’imposteur… Il y a encore place à amélioration et c’est mon défi personnel pour les prochains mois.

7) Au perfectionnement et à la «recherche et développement» tu consacreras du temps

cferland-perfectionnementQuand on est pris dans le quotidien, avec tous les «il faut» et une liste de choses à faire qui s’allonge sans cesse quoi que l’on fasse, il peut être difficile de dégager du temps pour prospecter l’avenir. Pourtant, il est essentiel de le faire et d’aller au-devant, au lieu d’attendre passivement que les choses viennent à soi… il s’agit de mettre en œuvre sa propre stratégie de développement professionnel (revoir le point #4). Pour l’historien, ça peut vouloir dire, concrètement:

  • rédiger le plan d’un prochain article ;
  • prendre position dans un débat (j’inclus ici les médias sociaux) ;
  • communiquer avec une société d’histoire pour proposer une conférence ;
  • suivre une formation d’appoint pour se perfectionner (en médias sociaux, en informatique, en français, en communication, etc.) ;
  • contacter un organisme pour offrir ses services de consultant ;
  • envoyer une proposition de communication ;
  • consacrer quelques heures pour maîtriser une nouvelle application ou un outil (voyez ici ce que j’ai réussi à faire en 2 h sur la plateforme wideo!);
  • écrire à un collègue pour établir une collaboration ;
  • se former en marketing et réseautage ;
  • se tenir informé des actualités du domaine et des domaines connexes ;
  • et tutti quanti.

Cela ne s’arrête jamais, surtout si vous devenez, comme moi, un historien-entrepreneur. Mais c’est aussi une manière extraordinaire de ne pas «s’encroûter» – rien de plus navrant qu’un historien qui ressasse les mêmes sujets pendant des années et des années!

Et j’ai envie de vous apprendre une belle nouvelle. Par un joli retour des choses, j’aurai prochainement l’occasion de «donner au suivant» en devenant MENTOR. Eh oui! le programme de mentorat de l’Université Laval a réussi à me convaincre de prendre des étudiants sous mon aile à compter de l’automne prochain. Ça me remplit de joie! J’ai l’impression que ce sera une expérience très enrichissante et formative pour moi également.

*

Voilà, voilà, ça y est: j’en ai fini avec mes «7 commandements» de l’historien.

La profession d’historien est, comme toutes les professions, jalonnée de défis. La principale difficulté réside, je crois, dans le manque de modèles hors de la sphère universitaire. Il faut donc se montrer créatif. Certaines personnes trouveront leur place dans ce bel écosystème tandis que d’autres préféreront s’engager dans une voie différente. Je respecte cela. Je veux simplement vous dire que oui, c’est possible de se construire une carrière sur mesure en tant qu’historienne ou historien. S’il n’y a pas de recette unique, j’ai voulu vous dévoiler ici mes réflexions et mes meilleurs trucs pour vous y aider. J’espère sincèrement que cela vous sera utile! 🙂 Laissez-moi vos commentaires.

Bises.

Catherine

Catherine Ferland est historienne, auteure et conférencière. Depuis 15 ans, ses thématiques de prédilection – histoire de l’alimentation, des boissons alcooliques, des petits produits «plaisir» et de la culture en général – lui donnent la chance de participer régulièrement à des émissions de radio et de télé, en plus de l’amener à faire des conférences aux quatre coins du Québec.