Vues de Québec, années 1840

Pour le plaisir, et à l’occasion d’une capsule d’histoire à Radio-Canada, voici quelques images de ma belle ville de Québec et de ses habitants au début des années 1840, telle que l’écrivain britannique Charles Dickens a pu la voir lors de sa visite.

Impressionné par les hauteurs de la ville et de son escarpement, Dickens l’a même baptisée le Gibraltar d’Amérique!

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Source des images : Bibliothèque et Archives Canada, Bibliothèque et archives nationales du Québec, Musée royal de l’Ontario, Wikimedia Commons. Domaine public.

Bises.

Catherine

Historienne, auteure et conférencière, Catherine Ferland est spécialiste d’histoire de l’alcool et de la gastronomie et, plus largement, d’histoire culturelle du Québec. Elle participe régulièrement à des émissions de radio et de télé, en plus de faire des conférences aux quatre coins du Québec. Elle a écrit ou coécrit une trentaine d’ouvrages et articles, dont Bacchus en Canada. Boissons, buveurs et ivresses en Nouvelle-France et La Corriveau, de l’histoire à la légende.  Elle signe des critiques culinaires au journal Le Devoir et fait régulièrement des chroniques d’histoire à Radio-Canada. Elle vit à Québec avec sa famille.

 

Qu’est-ce que tu «voeux» pour l’an neuf?

Bon sang. Force est de constater que j’ai été moins assidue que jamais sur mon blogue cette année. Si on ne fiait que sur ce paramètre, on pourrait bien croire que j’ai passé ces longs mois à flâner nonchalamment, en quasi retraite… mais si vous me suivez sur les réseaux sociaux, vous savez qu’il n’en est rien. Au contraire.

Permettez-moi de me livrer à un petit exercice tenant à la fois de la récapitulation et de la gratitude, de l’espoir et des résolutions. C’est pour moi l’occasion de remercier plein de monde. Je me concentrerai ici sur la sphère professionnelle, même si mes pensées premières vont à mes enfants, à mon chum, à mes amis… et à mes comparses de karaté! 🙂

Trois choses qui m’ont rendue heureuse en 2017

  • La poursuite de mandats entrepris dans les dernières années. MERCI notamment au journal Le Devoir, pour lequel j’écris depuis 2012, ainsi qu’à Cathy Chenard et à l’équipe de La Voie agricole, qui m’ont fait confiance pour une 4e saison consécutive: attendez de voir les belles capsules d’histoire, de terroir et de patrimoine qu’on vous a préparé!
  • La participation, comme chroniqueuse en histoire, à de nombreuses émissions de radio. J’ai particulièrement apprécié le privilège d’être «l’historienne en résidence» à Radio-Canada cet après-midi pendant une grande partie de l’année, ainsi que mes passages à Aujourd’hui l’histoire. MERCI aux auditeurs qui téléphonent ou écrivent pour dire qu’ils aiment mes capsules d’histoire!
  • La diversité des mandats d’articles en histoire… pour des revues qui ne sont pas du tout spécialisées en ce domaine! (L’histoire, c’est comme le sel : ça rehausse la saveur de pas mal de choses.) MERCI à Maison 1608 de me faire confiance pour plusieurs de ses revues (Magazine Y, Classe Affaires, 1608 et Vie de Château) ainsi qu’à Quatre-Temps et à Reflets.

Trois choses qui m’ont déconcertée et (agréablement) surprise en 2107

  • La participation à plusieurs activités inattendues, par exemple des tournages pour la Fabrique culturelle et pour le Musée de la civilisation à Québec, et surtout la superbe mission de conférences en Bourgogne avec la Commission franco-québécoise sur les lieux de mémoire communs. De beaux cadeaux dans mon année: MERCI!!!
  • La quantité et la qualité des invitations de presse, notamment au Bora Parc, à la Champagnerie, au Petit Manoir du Casino, au Côtes à Côtes resto grill, au Château Frontenac, au Cirque équestre Ekasringa, etc. MERCI à ces partenaires ainsi qu’aux chouettes équipes de Brouillard et de Tac Tic Marketing.
  • J’ai aussi obtenu de nouveaux mandats pour lesquels je dois demeurer discrète, confidentialité des clients oblige. Dans le jargon, on appelle la chose du ghostwriting, c’est-à-dire que, comme à Pierrot, je prête ma plume pour écrire des mots… sans que mon nom apparaisse. Mais puisque ces mandats touchent de très près mes valeurs et mes intérêts, c’est hyper agréable. MERCI à ces clients de m’avoir choisie comme trouvère pour faire chanter des mots sur des thèmes raffinés et gourmands.

La chose dont j’ai été la plus FIÈRE en 2017

  • L’organisation des premiers Rendez-vous d’histoire de la Nouvelle-France. Encore MERCI au Septentrion pour l’appui et au Griendel pour l’accueil, et merci surtout à toutes celles et tous ceux qui m’ont suivie dans cette aventure, prêtant leur savoir et leur être à la communication de l’histoire! Vous avez été fantastiques!

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Maintenant, trêve de récapitulation : cap sur l’avenir!

Cinq choses que je «voeux» et espère pour 2018

  • Entreprendre de nouveaux mandats de rédaction, de biographies et d’édition.
  • Atteindre le cap des 40 conférences dans l’année. (J’en ai donné 34 en 2017.) Pour le moment, il y en a déjà 11 de planifiées, alors ça augure bien. Celles avec formule dégustation «pognent» particulièrement beaucoup! Hi hi hi!
  • Trouver encore de nouvelles manières de communiquer l’histoire avec passion, à toutes sortes de publics. J’aimerais accroître les collaborations avec les musées. Et bien sûr, je compte revenir à la charge avec une seconde édition des Rendez-vous d’histoire
  • Me faire confier d’autres missions de conférences en France. Je l’admets volontiers, j’ai eu la piqûre. Et tant pis pour le décalage horaire, hein.
  • Finir et publier mon nouveau livre

Pour arriver à faire tout ça, je devrai bien sûr renoncer à «être à jour» en matière de sorties de films au cinéma, ma pile de livres à lire continuera de s’accroître, je consacrerai de nombreuses soirées et fins de semaine à travailler, mais le jeu en vaut la chandelle. Parce que j’y crois et que j’adore ça. Mon indice de bonheur n’a jamais été aussi élevé.

*

Et vous, qu’est-ce qui vous a fait vibrer en 2017 et, surtout, qu’espérez-vous de l’année qui vient? La vie est trop courte pour se contenter de laisser s’écouler des jours fades : osez rêver, osez voir grand, osez vous lancer! On ne sera jamais trop de gens passionnés et heureux.

Mes meilleurs vœux pour 2018, chers vous-z-autres!  😀

Bises.

Catherine

Historienne, auteure et conférencière, Catherine Ferland est spécialiste d’histoire de l’alcool et de la gastronomie et, plus largement, d’histoire culturelle du Québec. Elle participe régulièrement à des émissions de radio et de télé, en plus de faire des conférences aux quatre coins du Québec. Elle a écrit ou coécrit une trentaine d’ouvrages et articles, dont Bacchus en Canada. Boissons, buveurs et ivresses en Nouvelle-France et La Corriveau, de l’histoire à la légende.  Elle signe des critiques culinaires au journal Le Devoir et fait régulièrement des chroniques d’histoire à Radio-Canada. Elle vit à Québec avec sa famille.

 

Histoires cochonnes

Maintenant que j’ai attiré votre attention avec ce titre surprenant, lisez bien ce qui suit.

Pour la seconde année, j’aurai le plaisir de donner des conférences d’histoire gourmande sur le porc et le bacon à l’occasion du Québec Bacon Fest. L’événement rassemblera petits et grands amateurs de cette friandise salée le 3 juin 2017 à ExpoCité, à Québec.

Dans la foulée de cette collaboration festive, j’ai préparé neuf cartes-anecdotes intéressantes sur cet animal et sur son sous-produit ô combien apprécié des Québécois, le bacon. Vous les trouverez ci-dessous.

N’hésitez pas à partager votre «histoire cochonne» favorite avec vos amis. Le sourire est gratuit! 🙂 (Images aussi disponibles sur Pinterest)

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(Mon amoureux va sans doute me faire remarquer que j’ai fait un peu «d’humour à deux cesterces» dans certaines cartes. Bah oui, ça me tentait.)

Et vous, comment préférez-vous votre bacon? Au déjeuner avec œufs, rôtie et petites patates? Émietté sur une salade César? Dans un sandwich avec laitue et tomates? Un peu, beaucoup, passionnément? Moi, je l’aime très croustillant, avec échalotes ciselées et un peu de poivre, sur des pâtes Alfredo…

Bises.

Catherine

Historienne, auteure et conférencière, Catherine Ferland est spécialiste d’histoire de l’alcool et de la gastronomie et, plus largement, d’histoire culturelle du Québec. Elle participe régulièrement à des émissions de radio et de télé, en plus de faire des conférences aux quatre coins du Québec. Elle a écrit ou coécrit une trentaine d’ouvrages et articles, dont Bacchus en Canada. Boissons, buveurs et ivresses en Nouvelle-France et La Corriveau, de l’histoire à la légende.  Elle signe des critiques culinaires au journal Le Devoir et fait des chroniques d’histoire hebdomadaires à Radio-Canada. Elle vit à Québec avec sa famille.

Mon royaume pour un fromage

Quand il n’y a pas de mal à se faire plaisir

cferland-fromages-4Ahhhh! Est-ce que les excès du temps des Fêtes ont tendance à vous inspirer de bonnes résolutions – genre exercice et saine alimentation – vous? Et passé les premières semaines, quand janvier est révolu et que février se pointe le nez, parvenez-vous à garder le cap? Pour une gourmande assumée comme moi, c’est difficile de renoncer aux «bonnes choses».

Bon, j’ai réussi à couper presque totalement l’alcool et à bannir, du moins pour un temps, les chips et fritures. Mais si je suis parvenue à esquiver la Poutine Week cette année, il me semble impensable de couper le fromage! J’ADORE le fromage. Je devrais dire LES FROMAGES.

La réception d’un joli colis de la Fromagerie L’Ancêtre, avec à son bord un joli assortiment de fromages (dont plusieurs très «santé»), me fournit donc l’occasion rêvée de vous jaser de cet aliment, ma foi, incontournable de nos tables. Histoire oblige, débutons avec un petit récapitulatif de la généalogie du fromage québécois.

De la tradition à la modernité

Dans la mesure où les Amérindiens de la vallée du Saint-Laurent ne pratiquaient pas l’élevage ni la production de lait, l’histoire du fromage au Québec débute avec l’arrivée des colon français. Les premières vaches laitières font la traversée atlantique et débarquent à Québec dès le début du XVIIe siècle, ce qui permet graduellement de se constituer un bon cheptel. Bien sûr, les colons (donc beaucoup originaires de Normandie et de Bretagne) importent certaines recettes et traditions fromagères. La première production documentée en Nouvelle-France serait celle du «raffiné de Saint-Pierre», un fromage de lait cru qu’on commence à fabriquer vers 1690 à l’île d’Orléans, près de Québec. Affiné dans un coffre de bois, il se présente sous forme ronde et son goût évoque, semble-t-il le camembert. Il se vend trente sols la douzaine vers le milieu du XVIIIe siècle!

On importe aussi des fromages d’Europe, particulièrement de Hollande et d’Angleterre. Ces grosses meules de fromages fermes sont appréciées mais très chères, ce qui les réserve aux tables des mieux nantis.

Fabrication de fromage à l'École de laiterie de la province de Québec à Saint-Hyacinthe, 1945. BANQ.

Fabrication de fromage à l’École de laiterie de la province de Québec à Saint-Hyacinthe, 1945. BANQ.

La Conquête de 1763 a pour effet de stimuler la production fromagère : en effet, les Britanniques, notamment les immigrants loyalistes fuyant les États-Unis après la guerre d’Indépendance, favorisent l’introduction de types de fromages jusqu’alors pratiquement inconnus ici. Dans les décennies qui suivent, l’amélioration des races de vaches laitières et l’invention de nouveaux procédés mécanisés permet au fromage d’entrer dans la modernité. La première fromagerie de l’ère industrielle démarre ses activités à Dunham en 1856, tandis que la toute première fromagerie école d’Amérique du Nord est fondée en 1881 à Saint-Denis-de-Kamouraska. Comprenant la nécessité de se doter des connaissances et technologies les plus modernes, le ministère de l’Agriculture favorise ensuite l’ouverture de l’École de laiterie de Saint-Hyacinthe. Celle-ci ouvre ses portes en 1892 et, devenue plus tard l’Institut de technologie agroalimentaire de Saint-Hyacinthe, elle forme des milliers de jeunes hommes aux merveilles de la centrifugation, de la bactériologie, de la chimie, de la nutrition et même de la pasteurisation!

Toujours plus de fromages

Le Québec développe une spécialisation en cheddar qui lui vaut une renommée au-delà des frontières : au tournant du XXe siècle, des millions de caisses de cheddar québécois sont expédiées annuellement aux îles britanniques… et jusqu’à la table de la royauté. Or, cette expertise a son revers : ce type de fromage dominera le paysage fromager du Québec pratiquement jusqu’aux années 1940. Seuls le Oka et quelques types camembert et feta se démarquent un peu. En 1943, la fromagerie de l’abbaye Saint-Benoît-du-Lac crée le Bleu l’Ermite, premier fromage bleu québécois.

cferland-fromages-1Expo 67 a un retentissement important sur les goûts des Québécois, en ouvrant les horizons et en donnant envie de développer autre chose. Les fromagers fignolent leurs produits jusqu’à en développer d’excellents : ainsi, lors du World International Cheese Competition de 1972, un cheddar et un brick du Québec remportent respectivement le premier et le troisième prix. Deux ans plus tard, au même concours, le brick de la Coopérative agricole de Granby rafle les honneurs.
 Ayant pris confiance, on se met à expérimenter : les années 1990 voient foisonner les fromageries artisanales et  microfromageries où l’on utilise, outre celui de vache, des laits de chèvre et de brebis.

Le Québec compte aujourd’hui environ une centaine de fromageries (toutes catégories confondues), dont le travail est salué lors des concours nationaux et internationaux, notamment au World Championship Cheese Contest où nos fromagers remportent nombre de prix, médailles et honneurs de toutes sortes.

Nous pouvons être très fiers des fromages du Québec!

Des fromages pour tous les goûts

cferland-fromages-3Ce qui me ramène au plaisant colis qui a été déposé chez moi il y a quelques jours… Pour une fille qui se targue d’avoir goûté pas mal de choses ces dernières années (bon, pas autant que l’amie Allison, mais tout de même!), il me faut confesser que ça a été l’occasion de découvrir plusieurs fromages que je ne connaissais pas. La Fromagerie L’Ancêtre, basée à Bécancour, se spécialise en effet dans le bio et a développé une gamme résolument santé. Je vous parle ici de ceux qui m’ont particulièrement plu.

Ainsi, j’ai découvert avec beaucoup de plaisir le Port-Royal aux poivrons rouges et jalapeños : sans lactose et contenant seulement 7% de matières grasses, sa texture est évidemment différente, par exemple, de l’excellent Cheddar moyen (31% M.G., aussi sans lactose), mais ça nous donne un fromage éminemment savoureux et agréable à déguster tel quel. Je l’ai aussi essayé en omelette : c’était parfait, pas besoin d’ajouter quoi que ce soit d’autre! Pour celles et ceuzes qui aiment moins le piquant, la version aux poivrons rouges et verts conviendra très bien.

cferland-fromages-5Le Cheddar extra fort (31% M.G., sans lactose) et l’onctueux Suisse emmenthal (27% M.G., sans lactose) ont aussi été très appréciés chez moi : servis en petits cubes avec une belle assiette de légumes, c’est un snack plein de pep, même s’il faut y aller plus mollo car plus riche.

Quant au délicieux Parmesan (30% M.G., sans lactose), il n’a guère survécu au-delà de quelques repas familiaux (il est vrai que nous sommes cinq «bibittes à fromage» à la maison), râpé avec énergie et enthousiasme sur les pâtes et sur la salade César. Ça m’incite à faire ce vœu : ne plus acheter de parmesan autre que cette version faite localement,  bio et si réussie.

Menoum!

*

J’entends parfois le commentaire suivant : «Oui, c’est vrai que les fromages du Québec sont bons, mais ils sont trop chers!» On ne peut nier que le prix au kilo peut représenter un empêchement… Mais connaissez-vous le remède magique à cette situation? C’est de soutenir nos fromagers locaux. Ben oui. Acheter Québécois, c’est un choix qui a un impact beaucoup plus grand collectivement que celui qu’il peut avoir sur votre facture d’épicerie hebdomadaire. Achetons un peu moins, mais achetons mieux: au lieu de se procurer quatre fromages importés pour notre plateau de la Saint-Valentin, privilégions trois fromages du Québec. Puis tiens, «accrochons» au passage une bouteille de vin du Québec pour accompagner ça!

On dit parfois qu’il faut avoir la fierté à la bonne place. L’estomac, c’est un fichu de bon départ… Soyons fiers de nos produits d’ici et faisons-leur une place d’honneur à notre table.

Bises.

Catherine

Historienne, auteure et conférencière, Catherine Ferland est spécialiste d’histoire de l’alcool et de la gastronomie et, plus largement, d’histoire culturelle du Québec. Elle participe régulièrement à des émissions de radio et de télé, en plus de faire des conférences aux quatre coins du Québec. Elle a écrit ou coécrit une trentaine d’ouvrages et articles, dont Bacchus en Canada. Boissons, buveurs et ivresses en Nouvelle-France et La Corriveau, de l’histoire à la légende.  Elle signe des critiques culinaires au journal Le Devoir et fait des chroniques d’histoire hebdomadaires à Radio-Canada. Elle vit à Québec avec sa famille.

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Esprits frappeurs et spiritisme au Québec

À la mi-août 1851, la cage de la Corriveau est exposée à Québec, comme nous l'apprend cet entrefilet paru dans Le Canadien, 15 août, 1851, p. 3.

À la mi-août 1851, la cage de la Corriveau est exposée à Québec, comme nous l’apprend cet entrefilet paru dans Le Canadien, 15 août, 1851, p. 3.

À l’approche des Fêtes, je constate que ce blogue est resté plutôt inactif depuis les derniers mois. J’ai été fort occupée… mais à présent, j’ai bien envie de «commettre» un petit article amusant sur un thème qui sort de mes habitudes. (J’ai même pris la peine de vérifier si Vicky Lapointe avait écrit à ce sujet, puisqu’il s’agit clairement de son «terrain de jeu», mais le champ est libre!) 🙂 Considérez cela comme une friandise, un petit cadeau de Noël.

Pourquoi ai-je envie de vous parler de cela? C’est que récemment, j’ai eu le bonheur de prendre part à la série Trésors de la Capitale pour raconter le fascinant parcours de la cage de la Corriveau. Quand est venu le temps de décrire les années 1850, moment où a été retrouvée la cage pour la première fois près du cimetière de Saint-Joseph de Lévis, j’ai expliqué qu’il s’agit d’une époque où tout l’Occident est très friand de merveilleux, d’exotique, de surnaturel.

Au 19e siècle, des promoteurs comme P.T. Barnum font des affaires d’or avec leurs cirques, expositions, muséums, cabinets de curiosités et spectacles d’«humanités monstrueuses» (gens atteints de malformations, femmes à barbe, nains, géants, etc.) et d’animaux étranges. On essaie de communiquer avec les défunts, des séances de spiritisme sont organisées… Et les tables tournantes et autres manifestations d’esprits frappeurs suscitent l’attention du public. Mais aussi de l’Église, qui y voit une intervention diabolique destinée à détourner les âmes chrétiennes de leurs devoirs! C’est d’ailleurs ce qui explique que la cage de la Corriveau connaît un destin impressionnant dès 1851 : elle sera exposée à Québec, Montréal, puis New York, Boston et pour finir Salem…

Le film Les Autres (The Others, 2001), mettant en vedette l’actrice Nicole Kidman, fournit une bonne représentation de cette époque.

Mais comment ça se passait, ici même?
Y a-t-il eu des séances de spiritisme au Québec?

En fait, il semblerait que nous ayons eu notre lot de mediums, spirites et autres incantateurs. Des gens de toutes catégories sociales les fréquentent, mais ils attirent surtout la bourgeoisie aisée. Au milieu du 19e siècle, les tables tournantes sont même tellement populaires que l’archevêque de Québec finit par se fâcher!

Illustration de Louis Le Breton pour l’article «Tables tournantes», Dictionnaire infernal de Collin de Plancy, 1863.

Illustration de Louis Le Breton pour l’article «Tables tournantes», Dictionnaire infernal de Collin de Plancy, 1863.

Le 23 janvier 1854, monseigneur Pierre-Flavien Turgeon fait paraître une lettre pastorale dans plusieurs journaux, notamment Le Canadien et le Journal de Québec, pour décrire et condamner ce qu’il considère comme une véritable nuisance, un «moyen de séduction que l’esprit des ténèbres veut introduire pour égarer les âmes faibles et les faire tomber dans le péché».

L’archevêque dénonce tout particulièrement le fait que «on veut s’en servir comme d’un moyen pour connaître l’avenir et les choses les plus secrètes, pour évoquer les âmes des morts, pour les obliger à répondre aux questions qu’on juge à propos de leur faire, à révéler les mystères de l’autre monde», ce qui risque d’inciter à se laisser aller «aux illusions les plus dangereuses.»

S’il ne prétend pas connaître le principe même qui permet aux meubles de s’agiter de la sorte, il exhorte ses paroissiens à cesser de s’adonner au spiritisme. «Tous ces oracles, toutes ces révélations, que vous croyez obtenir au moyen des tables ou de tout autre objet mis en mouvement, par nous ne savons quel agent, ne viennent ni des âmes trépassées, ni des anges de Dieu, ni même probablement des anges des Ténèbres ; ce ne sont que des effets, des produits de votre imagination exaltée ou le reflet, l’écho de vos propres pensées.»

Et même s’il y avait effectivement une quelconque intervention spirituelle, elle serait forcément mauvaise… puisque les bonnes âmes sont au Paradis et ne s’occupent pas de ces choses! «Cette divination consistant à interroger Satan est interdite par l’Église» conclut-il. Pour lire cette lettre pastorale au complet, c’est ici.

Mais si l’Occident de l’époque industrielle a l’impression d’avoir «découvert», en quelque sorte, ce soi-disant système de communication avec l’au-delà, il faut admettre que certaines méthodes (et bien d’autres choses qu’on croit très novatrices) existent déjà depuis fort longtemps dans les cultures éloignées! Il faut parfois faire acte d’humilité… comme le souligne bien cet article de 1857!

Extrait du Journal de l'instruction publique, mai 1857

Extrait du Journal de l’instruction publique, mai 1857

 

Est-ce que les Québécois cessent pour autant de tenir des séances où les esprits sont interrogés? Il semble que non. Les archives révèlent notamment des perles, comme ce Rapport authentique des phénomènes de spiritisme observés dans la soirée du 8 novembre 1871. Quelques messieurs présents à cette soirée, Philéas Carrière, Adolphe Lamarche, Louis Labelle, Charles Labelle et Léandre Coyteux-Prévost, y témoignent de ce qu’ils ont vu et ressenti… Si quelqu’un a l’occasion de passer aux archives du Vieux-Montréal pour consulter ce dossier, je serais ravie de lire le compte rendu!

*

Les systèmes de croyances révèlent beaucoup de chose sur les sociétés, ne trouvez-vous pas? Quand on s’intéresse à ce qui se passe dans la tête des gens des siècles passés, on comprend beaucoup de choses. J’ai envie de laisser le mot de la fin à l’auteur des Soirées canadiennes qui, en 1861, estime que les contes et légendes populaires sont finalement plutôt inoffensifs face à ces histoires de tables tournantes! Quant à la cage de la Corriveau, si elle a révélé la plupart de ses secrets lors de l’expertise menée au Centre de conservation de Québec entre 2013 et 2015, on n’a heureusement pas tenté de l’utiliser pour communiquer avec sa malheureuse «locataire». Qui sait, peut-être nous apprendrait-elle enfin la vérité sur le meurtre de Louis Dodier…

– Catherine

Les soirées canadiennes, 1861, p. 162.

Les soirées canadiennes, 1861, p. 162.

Historienne, auteure et conférencière, Catherine Ferland est spécialiste d’histoire de l’alcool et de la gastronomie et, plus largement, d’histoire culturelle du Québec. Elle participe régulièrement à des émissions de radio et de télé, en plus de faire des conférences aux quatre coins du Québec. Elle blogue au catherineferlandhistorienne.com et signe des collaborations gourmandes dans Le Devoir depuis 2012.